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C’est ce qu’on appelle le naming. Cela consiste à concevoir des noms pour des marques, des services, des gammes de produits ou des produits simples. Par plaisanterie, on pourrait dire que tous les parents ont pratiqué le naming au moins une fois dans leur vie : il suffit de penser à combien notre nom est important et à la manière dont il nous caractérise au sein de la société, pour saisir rapidement l’importance d’un bon naming pour un produit ou un service qui entre sur le marché. Pour un nouveau produit, ou même, pour une start-up, il s’agit là du premier pas dans le monde de la communication. Et, le plus souvent, l’occasion de faire une bonne première impression ne se répète pas.
Quelles sont les caractéristiques des noms qui marchent bien ?
1. Ils expriment une identité, un caractère, une personnalité.
2. Ils sont faciles à prononcer. Ils sont souvent courts.
3. Ils sont très riches sur le plan symbolique : ils évoquent des histoires, des sensations, des émotions.
4. Ils sont spécifiques sans être explicatifs : ils suggèrent avec précision sans être de simples descriptions.
Voyons ensemble quelques exemples. Certains suivent parfaitement ces principes directeurs, d’autres présentent quelques caractéristiques différentes :
Eataly : ce nom dérive du verbe manger et du mot Italie, tous deux dans leur forme anglaise, et possède toutes les caractéristiques énoncées précédemment. Il exprime une identité, il sonne bien, il est symbolique et précis sans pour autant décrire le projet.
Quattro Salti in Padella : (littéralement, Quatre sauts dans la poêle) désigne une célèbre gamme de plats préparés. Son nom est si musical, qu’on dirait une comptine. Voilà pourquoi sa longueur n’a pas été un obstacle à sa diffusion.
IBM : contraction de International Business Machines. Recourir à ce procédé, qui consiste à utiliser des sigles et des acronymes pour créer des noms, demande aujourd’hui beaucoup d’attention. Nous verrons pourquoi dans le paragraphe suivant.
Réussir votre naming
Dans le monde actuel, qui regorge de produits et services, trouver un nom marquant, convaincant et intéressant a encore plus d’importance qu’autrefois. Si vous êtes en train de réfléchir au nom que vous donnerez à votre prochain produit, voici quelques conseils :
1. Analysez l’univers de référence
Qui cherche trouve, généralement. Avant d’écrire, faites-vous une idée de la concurrence. Évaluez avec attention les noms utilisés par les concurrents de votre secteur et notez les plus intéressants, les plus originaux et ceux des produits qui ont le mieux réussi.
2. Connectez, associez, recomposez
Après vous être fait une idée des noms avec lesquels vous devrez rivaliser, commencez la phase créative à proprement parler. Tout d’abord, il peut être utile de chercher à faire des associations. Savez-vous comment est né le nom Eataly, par exemple ? Le secteur de l’alimentation (d’où a été tiré le mot Eat) a été associé à celui de l’italianité (d’où le choix du mot Italy). La connexion est particulièrement bien réussie grâce à la facile mémorisation et la simplicité de la prononciation, qui évoque à nouveau le mot Italy.
3. Libérez le langage (mais avec discernement)
Le langage est un laboratoire où il est possible d’expérimenter, d’inventer des néologismes, de jouer avec les mots. Mais, une liberté sans règles peut donner le vertige et provoquer un blocage. Il peut être utile de suivre quelques lignes directrices :
Modification de lettres, ajout ou élision
Vous pouvez, par exemple, changer la lettre d’un mot, l’ajouter ou la supprimer de façon à créer des néologismes originaux et évocateurs. Personnellement, je vous suggère de n’apporter qu’une seule modification à la fois par rapport au mot de départ. Le nom du blog Pennamontata est un exemple de ce procédé, le « a » de pannamontata (crème fouettée) a été remplacé par un « e », transformant ainsi panna (crème) en penna (stylo).
Fusion (crase) entre mots
Réunir et mélanger deux mots est une excellente technique. Mais si vous optez pour ce procédé, comme pour Alitalia (Ali signifiant Ailes + Italia), faites attention à la musicalité du résultat. Il est sage de respecter la règle qui consiste à faire coïncider la partie finale du premier mot avec la partie initiale du second mot. L’exemple de Pinterest, mot-valise formé des mots Pin (épingle) et Interest (intérêt), réunis par les lettres qu’ils ont en commun « in », est particulièrement réussi.
4. Pas uniquement des néologismes
Parfois, des noms tout prêts nous viennent à l’esprit, surgissant spontanément d’univers très différents, par un processus métaphorique. Il faut donc apprendre à analyser les caractéristiques d’un produit et à laisser notre esprit vagabonder vers des horizons très lointains… Ce verre est-il vraiment très robuste ? Robuste, comment ? Comme un gorille ? Et voilà : Gorilla Glass. Idem pour Yoga, nom donné à un portable dont l’écran est plus flexible que la plupart des autres.
5. Les acronymes : partis par la porte, pour revenir par la fenêtre du web
Aujourd’hui, les acronymes – comme IBM – ne marchent plus très bien, car ils ne sont ni immédiats, ni évocateurs et ont besoin d’être expliqués. En substance, ils sont tout le contraire de ce qui marche à l’ère de la révolution numérique. Mais, il faut cependant admettre que :
• Il est possible de faire des acronymes dès lors que le résultat final aboutit à un mot avec un vrai sens, ou presque. Si, de plus, ce mot est particulièrement évocateur, le tour est joué. Par exemple : Mambo, le Musée d’Art Moderne de BOlogne. Il s’agit là d’un excellent nom, plein de personnalité et de potentiel évocateur.
• Parfois, les acronymes permettent de créer des mots nouveaux, encore libres et utilisables comme noms de domaine de site. Ce qui, dans le contexte actuel, est d’une importance capitale.
6. Au-delà du sens, le feeling
Les mots ont des sonorités, des formes, des couleurs, des températures. Le M exprime l’accueil, le A le calme, le O l’achèvement. Le I est plus froid que le E. Des consonnes comme R et T communiquent une idée de dureté, il est donc préférable de ne pas en abuser si le nom doit évoquer l’accueil et la douceur. Saviez-vous, de plus, que de nombreuses personnes attribuent une couleur aux voyelles (synesthésie) ?
7. Un nom en entraîne un autre
Chaque nouveau nom en amène de nombreux autres. Il est préférable de créer 10 noms en trop qu’en moins, car chaque nom que vous noterez peut en engendrer d’autres. Écrivez-en beaucoup, à tout moment, même quand vous faites autre chose. Laissez aller votre imagination, faites des associations, encouragez votre inconscient à avoir un rôle dans le processus créatif. Amusez-vous. Il vous faut tout d’abord créer des noms, le temps de la sélection viendra plus tard.
8. Entre naming et domaine du site : le cas Ikea.
S’il s’agit d’un produit dont la mise sur le marché est liée au numérique, il est nécessaire que le nom et le domaine internet soient parfaitement concordants. En général, cela permet d’être plus facilement trouvé par des utilisateurs potentiels. Mais, cela vient augmenter les difficultés : si, avant l’avènement du numérique, il suffisait qu’un nom n’ait pas déjà été attribué à d’autres entreprises du même secteur ou de secteurs proches pour pouvoir être utilisé, il est maintenant nécessaire de vérifier que le domaine internet soit disponible, ce qui rend la tâche encore un peu plus complexe.
La numérisation du naming est en train de modifier également l’aspect créatif du travail. Si, d’un côté, la nécessité de trouver des noms de domaine libres de droits oblige à renforcer le pouvoir symbolique du nom à créer, d’un autre côté, cette contrainte fait naître une certaine tendance à privilégier des noms de plus en plus explicatifs et descriptifs, qui, il y a encore quelques années, n’auraient même pas été envisagés. L’objectif recherché est que le nom puisse déjà, en partie du moins, correspondre à une véritable clé de recherche de l’utilisateur.
Des exemples ?
- https://foodandtravel.com/
- https://www.booking.com
- https://coolmaterial.com/
Dans chacun de ces noms, la composante descriptive l’emporte nettement sur la composante évocatrice et émotionnelle. Si d’un côté, on perd en expressivité, de l’autre, on s’assure un certain trafic grâce à l’utilisation de mots qui correspondent déjà à de véritables requêtes de recherche.
Il est toutefois possible de transformer cette tendance, qui risque de rendre le résultat final un peu plat, en quelque chose de bien plus inventif. Sur le site Ikearetailtherapy.com, les noms des produits Ikea ont été renommés de manière ironique, sur la base de réelles clés de recherche des utilisateurs. Un canapé a été rebaptisé, par exemple, Mon partenaire ronfle, un boulier, Partager les frais avec mon partenaire, une ardoise pense-bête est devenue Il ne sait pas me dire qu’il m’aime.
Cette campagne a été une vraie réussite et une preuve de la grande empathie d’Ikea envers son public : il s’agit, pour l’enseigne, de se mettre à la place des personnes avec lesquelles elle dialogue, d’une manière complice et ironique, et de montrer qu’il ne s’agit pas de meubles mais bien de vie réelle, avec tout ce qu’elle comporte de petits et grands faits du quotidien. L’idée est certainement excellente.
Pour conclure sur le naming
La règle la plus importante est sans doute celle-ci : il n’existe pas de vraies règles mais des principes directeurs. En résumé, les acronymes de type IBM, par exemple, ne marchent plus, mais en théorie seulement. Les noms courts sont efficaces, mais Quattro salti in padella (Quatre sauts dans la poêle) est facile à retenir. Les noms trop explicatifs sont froids et banals, pourtant le cas Ikea semble nous indiquer que suivre cette voie peut être profitable.
Nous espérons que cet article vous aura été utile. Bonne chance pour votre prochain naming !